24 octobre 2016

"CETA, C'EST ASSEZ ?"

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Le Courrier (Genève)
Vendredi 21 octobre 2016
Philippe Bach

L’histoire pourrait être drôle. La petite région de Wallonie (3,5 millions de personnes) est en train de bloquer la mise sous toit d’un accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada. Depuis hier soir se tient une réunion de la dernière chance des ambassadeurs des 28 Etats-membres de l’Union européenne pour tenter de sauver ce texte controversé qui devait être signé le 27 octobre.
Connu sous l’acronyme anglo-saxon de CETA, (pour Accord économique et commercial global) ce texte libéralise les échanges entre ces deux économies. Et surtout, assure une sécurité accrue aux investisseurs. Comme pour la plupart de ces traités liberticides et visant à priver l’Etat de sa capacité d’agir –TISA, AGCS et autres TTIP –, le CETA porte en lui le principe de primauté du privé.
Dans un marché libre et non faussé, des secteurs comme la santé,  l’éducation ou l’énergie ne doivent pas souffrir de l’ingérence de l’Etat. Et cela peut mener relativement loin. En Allemagne, la gauche ferraille contre ce texte, échaudée par une plainte déposée par la société suédoise Vattenfall contre l’Etat. Cette société, qui exploite deux centrales nucléaires outre-Rhin, demande compensation à la suite de la décision du gouvernement allemand en 2012 de sortir de l’atome.
Sentant le vent du boulet, les négociateurs de l’accord CETA ont certes prévu quelques garanties minimales. Les milieux altermondialistes estiment que trop de flou subsiste sur l’indépendance des futures juridictions chargées d’arbitrer les conflits.

C’est d’ailleurs toute la transition énergétique et le respect du Traité de Paris qui sont menacés par ce texte libre-échangiste.
Les pressions exercées sur la Wallonie sont considérables. Comment une petite région ose-t-elle prendre en otage le Grand marché européen de 500 millions de consommateurs, pardon, d’habitants? Cela porte un nom. C’est la démocratie. Et cette région belge exerce un droit fondamental. Saluons donc le courage de ces élus et relevons qu’un pays qui a pu fonctionner à satisfaction sans gouvernement pendant 194 jours (1) mérite sans doute d’être écouté.

http://www.lecourrier.ch/

(1) PS. A part qu'en 2011, la crise belge a duré un peu plus que 194 jours : "Après 541 jours de crise politique pendant lesquels le pays a été dirigé par le Premier ministre par intérim Yves Leterme, la Belgique s'est enfin dotée d'un gouvernement lundi..." 
194 jours, c'était en 2007-2008.

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